Je vois que tu as raison de poser cette question au vu des réponses, il y a visiblement besoin d'éclaircissements.
Il est vrai que la tâche n'est pâs facilitée par certains "intellectuels", pour qui tout ça c'est la même chose, c'est toujours la haine du juif. D'ailleurs tu aurais pu à cet égard rajouter l'antiaméricanisme, l'anticapitalisme et l'antilibéralisme qui paraît-il cachent aussi l'antisémitisme.
Je ne reprendrais pas à mon compte le distingo idiot consistant à dire que les juifs ne sont pas les seuls sémites. (1), car le terme a été forgé initialement pour désigner spécifiquement la détestation des juifs, considérés de manière assez générale et floue (religion, race, communauté etc)
Le sionisme quant à lui désigne un mouvement politique qui prend naissance et place dans le phénomène historique des nationalismes (printemps des peuples) du XIXème.
Il est né dans le monde germanique, où la question juive était toujours en suspens. Cela n'est pas anodin : en effet la conception allemande de la nationalité, fondée sur un communautarisme ethnique (la notion de Volk), très différente de la française (contrat social auquel tout individu peut adhérer quelle que soit son origine), a fortement contribué à l'émergence du concept de "peuple juif" (avec l'édification d'une mythologie allant dans ce sens, en particulier le concept de diaspora) au fondement du sionisme, et qui seul le justifie.
Le sionisme est un nationalisme qui proclame l'existence d'un peuple juif spécifique et son droit à se fonder en tant que nation, sur un territoire où il exerce sa souveraineté. (2)
Quant au judaïsme (ou israëlisme), il renvoie normalement à la seule pratique religieuse. Mais par extension, il peut désigner aussi la culture (et donc l'etnicisme) de la communauté juive
Par conséquent, on peut définir ces termes ainsi :
antisémitisme : forme de xénophobie visant les "juifs" perçus en tant que tels : suivant les personnes, cela peut viser les juifs "affichés", les personnes issues de familles"juives", ou ayant eu des ancêtres juifs (notamment à l'époque où ils formaient une classe sociale formellement identifiée sous l'Ancien Régime, avec des droits (ou non-droits) particuliers et un statut d'infériorité), ou les personnes considérées comme membre de la "communauté juive" (réelle ou fantasmés), ou dans sa forme la plus large une supposée "race juive".
La "race juive" est un concept qui a émergé en même temps que celui de races humaines au XIXème siècle, et qui est en étroite relation avec les notions d'ethnie, de peuple, et donc avec le mouvement des nationalités. Les balbutiements de la biologie et une conception erronée de la génétique, issue des pratiques d'élevage (sélection des espèces ou "races" les plus productives par "purification" (3)) ont abouti à classifier l'humanité en prétendues "races" ((y compris française, anglaise, allemande et autres âneries)
Antijudaïsme : contestation ou rejet de la religion juive, de ses croyances, de ses pratiques, de sa doctrine...
Rejet de la culture, du folklore (völlkism), ou du communautarisme juif
Antisionisme : rejet de la doctrine sioniste. Cela peut être le refus de reconnaître le droit du peuple juif à une terre, à un pays, mais aussi la négation de la pertinence du concept même de peuple ou de nation juifs (dans ce cas l'idée de droit à une terre devient évidemment caduc)
De nos jours, l'Etat d'Israël étant devenu une réalité, l'antisionisme conssite plutôt à s'opposer aux actions de cet Etat, à contester sa politique, plus loin sa légitimité et éventuellement son "droit à exister", au moins en tant qu'Etat spécifiquement juif.
Tout cela est très différent, mais les sionistes ont intérêt à créer la confusion pour jouer sur la culpabilité liée au génocide de 40-45 afin de faire taire les critiques.
Cela est parfaitement spécieux, puisqu'il existe des juifs antijudaïques (qui rejettent la religion juive et sont athées ou se convertissent, ou qui rejettent la culture, le folklore, ou le communautarisme juifs), des juifs antisionistes (qui rejettent l'idée de créer une nation juive)(4), et même des juifs antisémites (personnes issues de la communauté mais rejetant cette appartenance et refusant absolument de s'identifier comme "juif" ; les juifs les qualifient de "juifs honteux de l'être")!
to be continued, si j'ai le temps
@dd : il est certain que pas mal d'antisémites se dissimulent derrière l'antisionisme pour tenir un discours "présentable". Cependant il y a aussi des antisionistes qui n'ont rien contre les juifs, mais considèrent que l'Etat d'Israël est une source de problèmes en soi et n'est rien d'autre qu'un état colonial.
Remarquons en outre qu'il y a aussi des antisémites favorables au sionisme, pour qui le fait d'envoyer les juifs dans un pays à eux permet de s'en débarrasser!
Je partage l'idée que le sionisme finit par être une doctrine d'extrême-droite, et une forme de fâchisme. Bien qu'au départ ses promoteurs étaient démocrates et d'inclination socialiste, conformément au sentiment politique dominant chez les juifs européens (minorités dans leurs pays), la dérive ultra-droitière est patente. Il est quand même significatif que le parti travailliste soit tombé aussi bas, et surtout que depuis près de 30 ans maintenant se succèdent au pouvoir des personnages issus quasi-exclusivement de l'armée et pire des services secrets.
Dans quel pays démocrate voit-on autant de généraux au gouvernement? Begin, Barak, Sharon, Livni... Et les gens informés savent le poids de Meir Dagan et du Mossad dans la stratégie d'Israël (c'est lui qui a monté et décidé des opérations au Liban et "plomb durci" par exemple, et qui soèuffle sur les braises pour l'Iran). Tout cela est profondément malsain.
Mais cette évolution n'était-elle pas inscrite dès le départ dans le projet même de fonder un Etat juif en Palestine par la force, en expulsant et spoliant les populations locales, créant inévitablement un environnement intérieur et extérieur qui ne peut être qu'hostile? Israël, c'est une évidence, ne peut se maintenir que par la force et par la peur qu'il inspire, autrement dit être en guerre permanente, et par voie de conséquence vivre dans une paranoïa permanente, le convainquant qu'il faut continuellement affaiblir ses voisins par des agressions continuelles, par des actions de déstabilisation en en entretenant la confusion et le chaos (Bantoustans palestiniens, Liban). Je ne vois aucune chance de normalisation de ce pays tel qu'il fonctionne.
Et vu les dégâts collatéraux que cela cause, je me demande si le jeu en vaut la chandelle...
@ shadok : il y a quand même un truc qui est vrai, c'est que les "penseurs" du libéralisme écnonomique (en particulier l'ultra-libéralisme), les néo-cons, et une bonne partie des promoteurs du capitalisme et du libre-échange sont juifs d'origine c'est un fait :
ultra-libéraux : Hayek, Milton Friedmann, Lucas...
néo-cons : Léo Strauss, Kristol, Wolfowitz, Perle, j'oublie les autres mais il y en a un gros paquet.
libre-échange : déjà David Ricardo...
Est-ce un hasard? Karl Marx (lui-même d'origine juive) avait écrit des mots sanglants sur le rapport étroit entre judaïsme et capitalisme, raison pour laquelle il détestait et reniait le judaïsme. Lire à ce sujet (c'est pas très long) "la question juive" (réponse à Bauer) (5)
Lisible ou téléchargeable ici :
http://classiques.uqac.ca/classiques/Marx_karl/question_juive/question_juive.html
ou ici :
http://www.marxists.org/francais/marx/works/1843/00/km18430001c.htm
Lire aussi Abraham Léon
http://www.marxists.org/francais/leon/CMQJ00.htm
Ce lien est donc fait par les juifs eux-mêmes... ce qui ouvre pas mal de réflexions.